Elément d’équipement installé sur un existant : vers une protection accrue du maître de l’ouvrage
En ce début d’année 2018 et pour débuter notre chronique d’actualité jurisprudentielle en droit de la construction, il semble difficile de passer sous silence, un important revirement jurisprudentiel qui vient de se produire dans le domaine de la garantie décennale des constructeurs en matière de travaux sur existants.
En effet, la Cour de cassation, aux termes de trois arrêts similaires, a manifesté son souhait de faire évoluer sa jurisprudence en la manière et, énonce que désormais, les désordres affectant les éléments d’équipement, dissociables ou non, d’origine ou installés sur existant, relèvent de la responsabilité décennale lorsqu’ils rendent l’ouvrage, dans son ensemble, impropre à sa destination.
En l’espèce, ces litiges portaient sur la pose d’une pompe à chaleur et d’un insert de cheminée installés sur un ouvrage préexistant.
Le cadre factuel des travaux était donc le suivant : il s’agissait d’une adjonction d’un élément d’équipement dissociable sur un ouvrage existant.
Or dans ce cas précis et antérieurement à ces importantes décisions, cette adjonction d’un élément d’équipement dissociable sur existant, n’était susceptible d’entrer dans le champ d’application de la garantie décennale que s’il était lui-même constitutif d’un ouvrage et avait fait l’objet de travaux importants d’adaptation relevant de techniques de construction.
Ainsi, l’entreprise, installant un élément d’équipement dans un bâtiment existant et ce, en procédant à des travaux de faible importance (ne donnant pas naissance à un ouvrage) ne pouvait voir engager que sa responsabilité contractuelle de droit de commun en cas de désordres.
Dans son arrêt du 15 juin 2017, la Cour de cassation estime, au visa de l’article 1792 du Code civil, que « les désordres affectant des éléments d’équipements, dissociables ou non, d’origine ou installés sur existant relèvent de la responsabilité décennale lorsqu’ils rendent l’ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination ».
Les arrêts du 14 septembre et 26 octobre confirment explicitement ce principe.
Il s’agit d’une simplification du régime de la responsabilité décennale car il convient de ne plus distinguer entre les éléments d’équipements installés à l’origine ou ajoutés et entre les éléments dissociables et indissociables.
Tous, désormais, relèvent de la responsabilité décennale lorsque l’on se trouve en présence de dommages rendant l’ouvrage, dans son ensemble, impropre à sa destination.
Ces décisions s’inscrivent dans un mouvement protectionniste du maître de l’ouvrage, qui ne manque de poser certaines interrogations en matière d’assurance obligatoire.
En effet, un constructeur qui installe sur un existant un élément d’équipement, dissociable ou non, (pompe à chaleur, panneau solaire, climatiseur, insert…), contribuant au caractère habitable de l’ouvrage dans son ensemble (chauffage, etc..) peut être tenu de la responsabilité décennale en cas de désordres affectant ces équipements portant atteinte à la destination de l’ouvrage existant dans son ensemble.
Ainsi, un certain nombre d’artisans et entrepreneurs effectuant ce type de travaux sur existant, sans être couverts par une police d’assurance en responsabilité décennale, devront rapidement revoir leur couverture en matière d’assurance et obligatoirement souscrire un tel contrat d’assurance.
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